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La formation continue pour prévenir le reclassement

Paysagiste à Mably (42), Joël Palluet accorde une grande importance à la formation pour sécuriser l'emploi de son personnel, rester en phase avec la législation et prévoir l'évolution des postes. Au sein de son entreprise, un salarié en situation de handicap se prépare à changer de fonction.

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Dirigeant de Profession Jardinier, entreprise du paysage installée à Mably (42), Joël Palluet entend pérenniser l'emploi d'un de ses employés. Ce dernier, arrivé en avril 2007, occupe le poste d'ouvrier paysagiste. Il a été victime, en juillet 2005 chez son employeur précédent, d'un accident du travail : une chute de six mètres lors d'une prestation d'élagage. Principale conséquence : tête radiale cassée au niveau du coude gauche, ce qui a nécessité la pose de quatre vis qui resteront en place à vie. Aujourd'hui âgé d'une trentaine d'années, il avoue être quelquefois gêné dans ses mouvements, notamment s'il s'agit de travailler les bras en l'air, par exemple pour poser des choses en hauteur sur des étagères. Ou alors, en élagage, le travail en bout de branche lui est difficilement possible avec le bras gauche. Cette gêne reste modérée, mais il doit constamment s'adapter, forcer davantage avec l'épaule ou le bras droit. Il a surtout quelques craintes par rapport à l'avenir, aux risques d'arthrose, et de ne plus pouvoir tendre correctement le bras. « On ne sait pas comment ce handicap va évoluer dans les prochaines années », précise Joël Palluet. « Il peut se stabiliser comme il peut s'aggraver avec le risque d'une diminution des capacités physiques. C'est pourquoi, autant du point de vue de mon employé que du mien, il nous est paru nécessaire d'anticiper et de prévoir une évolution de son poste de travail pour garantir son emploi à long terme au sein de la société. »

Actuellement pas équipée d'un véhicule de type poids lourd, l'entreprise fait appel à un sous-traitant pour le transport de matériaux et de gros matériels. « Dans les années à venir, j'envisage l'achat d'un camion-grue pour faciliter l'organisation du travail et éviter le déchargement manuel des matériaux sur les chantiers, et ainsi rendre le travail moins pénible. Cela nécessite de préparer une personne au poste de chauffeur poids lourd. J'ai proposé cette formation à mon salarié pour lui permettre d'évoluer vers un emploi moins physique, plus adapté à son handicap. Il a tout de suite été intéressé », poursuit Joël Palluet.

La sécurisation du parcours professionnel

Cette formation comprend trois volets : permis poids lourd, permis super lourd et Fimo (formation initiale minimum obligatoire *). Son coût est élevé, entre 7 000 et 8 000 euros, sans compter la rémunération du salarié (300 heures minimum de formation). L'entreprise devait donc trouver des solutions de financement adaptées à cette situation. « Après un entretien avec un conseiller du Fafsea, celui-ci nous a proposé la période de professionnalisation, réservée aux publics fragiles dont les personnes en situation de handicap. L'objectif étant la sécurisation de leur parcours professionnel. Pour les entreprises du paysage, ce dispositif permet d'accéder à un financement de 25 euros par heure de formation, couvrant uniquement les frais pédagogiques et annexes (repas, déplacement) ; la rémunération du salarié restant à la charge de l'entreprise. Pour 300 heures, cette dernière peut prétendre à un montant global de 7 500 euros. Grâce à cette aide, la formation a pu rapidement se mettre en place. Le salarié a bénéficié de dix semaines de stage, réparties sur trois périodes entre le printemps et l'automne 2011 (deux périodes de trois semaines et une de quatre semaines) pour ne pas trop perturber l'organisation des chantiers.

Aujourd'hui, même si le poste de chauffeur n'est pas encore effectif à Profession Jardinier, la formation a donné au salarié les moyens d'envisager un avenir plus sécurisé, et au chef d'entreprise de pourvoir un poste de travail sans devoir recruter une personne extérieure. Mais elle a surtout permis d'éviter, pour les années à venir, un éventuel reclassement ou une reconversion professionnelle, des solutions toujours socialement et économiquement très coûteuses. Cette action préventive entre dans une politique globale. Deux fois par an, Joël Palluet propose à ses dix salariés un entretien individuel pour échanger sur leur travail, voir comment ils peuvent progresser dans leur poste. C'est aussi l'occasion d'aborder les propositions de formation. « Elles sont choisies en fonction du profil de chacun, des besoins et des objectifs de l'entreprise », explique-t-il. « Nous faisons en sorte que chaque salarié puisse suivre une formation tous les ans ou tous les deux ans (entre un et cinq jours selon les thèmes retenus). »

Limiter le coût financier

L'entreprise privilégie les formations obligatoires liées à la sécurité et à la législation du travail : sauvetage-secourisme, gestes d'urgence, CACES (certificat d'aptitude à la conduite en sécurité), permis remorque... et celles dédiées à la technique comme l'élagage. « Dans la mesure du possible, pour une meilleure prise en charge financière, nous choisissons des stages inscrits au catalogue Fafsea », poursuit Joël Palluet. Sur ce type de formation, les entreprises de moins de dix salariés peuvent prétendre à un financement couvrant (selon la durée et le lieu) tout ou partie des frais pédagogiques, des frais annexes et salaires, à concurrence de 700 € par session (avec un maximum de quatre demandes par an par entreprise). Il n'en reste pas moins que cela peut représenter un coût non négligeable pour l'entreprise, notamment au niveau des frais de déplacement, d'hébergement, de restauration quand il faut se rendre en région lyonnaise (c'est le cas notamment pour les formations en élagage). Dans certains cas, par exemple pour les formations CACES ou de secourisme, pour limiter les frais et pour former l'ensemble du personnel, il est possible d'organiser la session dans les locaux de la société, « en intra » ; c'est donc le formateur qui se déplace.

Claude Thiery

(*) Formation théorique et pratique permettant d'obtenir la qualification pour exercer le métier de conducteur de marchandises ou de voyageurs. Elle aborde notamment les règles de sécurité à respecter en service et les réglementations du transport. Elle doit être actualisée tous les cinq ans.

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